Passage du Nord-Ouest dans l'Arctique canadien

Nous atterrissons à l’aéroport de Cambridge Bay en provenance d'Europe, puis rejoignons notre hôtel où le reste du groupe nous attend.

Après un petit-déjeuner à l'hôtel, la journée sera consacrée à la préparation finale de l'expédition avec la révision du matériel et la vérification des équipements, les formalités administratives et les derniers achats avant le départ. Le matériel collectif est partagé entre nous sur une base équitable. Nous vérifions chaque équipement, afin d’éviter toute mauvaise surprise une fois que nous serons en expédition. Ensemble, nous préparons les rations alimentaires journalières en tenant compte des exigences caloriques et en prenant quelques jours de sécurité.

Après le petit-déjeuner, c'est le top départ de notre expédition de 400 kilomètres pour une vingtaine de jours... Comme dans toute expédition, nous ajustons notre rythme en ski pulka dans ce début de vallée et nous évoluons en acceptant l’omniprésence du froid, il faut trouver ses marques afin de monter en puissance les jours suivants. Surtout, ne pas céder à l'excitation du départ, bien prendre son temps et son rythme. Nous sommes encore sur la terre ferme mais plus pour très longtemps.

Lorsque la journée touche à sa fin, nous montons le premier camp, et nous sommes heureux de retrouver notre confortable sac de couchage après cette première journée sur les skis.

Les jours qui suivent nous emmènent sur les traces historiques de l'explorateur Roald Amundsen lorsqu'il ouvrit la voie maritime reliant l'océan Atlantique à l'océan Pacifique en 1906.

Nous évoluons les premiers jours sur la glace de mer, puis il faut louvoyer entre les crêtes de compression et se faire un chemin dans cette immensité de glace sous oublier que nous traînons une pulka chargée de près de 90 kilos à notre départ. D'autres passages sont plus glissants pour les skis et moins techniques avec un relief plus doux, nous permettant d'augmenter notre moyenne de kilomètres quotidiens et de respecter 20 kilomètres par jour, environ.

Même si l'effort requis est important, il faut s'économiser pour monter quotidiennement notre camp et satisfaire au rituel immuable de la fonte de la neige à l'aide du réchaud pour notre eau et préparer nos rations lyophilisées.

Chaque matin, les tentes sont démontées, soigneusement pliées et rangées dans nos pulkas savamment organisées, sans oublier d'effacer toute trace de notre passage avant chaque départ matinal.

De longues journées sur les skis, l'occasion d'apprécier l'immensité qui nous entoure, réfléchir et méditer dans ce silence et peut être la chance d'apercevoir certains animaux : des phoques, des lagopèdes ou encore des bœufs musqués. Si les traces sont parfois visibles et fraîches, n'oublions pas que nous sommes sur le territoire de l'ours polaire ; nous devons rester vigilants.

Notre itinéraire nous emmène sur l'île de Jenny Lind, avant de retrouver la glace de mer pour au moins 3 ou 4 jours difficiles au milieu des crêtes de compression. Nous devons prendre en compte les caprices de la météo dont l'humeur changeante fait varier notre progression quotidienne, rendant les kilomètres quasi-impossibles. Il se peut même que nous devions passer une journée sous tente pour laisser passer la tempête ou le piterack, très fort vent catabatique du Groenland.

L'expérience de notre guide et les prévisions météo reçues par satellite de notre routeur météo privé basé en Europe, nous permettent d'opter pour la meilleure solution. Quoi qu'il en soit, il faut essayer de tenir notre rythme pour atteindre notre objectif et relier le village de Gjoa Haven dans les temps.

La dernière partie de l'expédition se fait pour l'essentiel sur de la glace de mer. Une vigilance toute particulière est nécessaire pour skier sur une très fine couche de neige déposée sur de la glace bleue, une progression délicate, surtout avec des pulkas encore bien lourdes. Il en est de même sur de la glace peu épaisse, notre guide nous aide à trouver les meilleures trajectoires.

Assez rapidement, nous devrions apercevoir une antenne de base radar dans notre viseur et garder ce point de repère pour « accoster » sur King William Island. Après avoir louvoyé entre les crêtes de compression, les hummocks (monticules de blocs de glace formés par la pression de la banquise) et les trous de phoques, nous rejoignons de nouveau la terre ferme, accompagnés par le ballet des lagopèdes des neiges (ptarmigans) et sous l'œil des bœufs musqués, impressionnants par leur carrure et la toison épaisse qui les caractérisent.

Même si nous sommes tributaires de notre environnement polaire arctique, qu'il s'agisse du vent, du whiteout (jour blanc avec très peu de visibilité) et des tempêtes, il nous reste encore une centaine de kilomètres à parcourir pour atteindre notre objectif. La motivation de l'équipe et l'excitation d'atteindre notre objectif final tendent à accélérer notre rythme de progression malgré la fatigue. Gjoa Haven est bientot en vue, nous devons rester focus.

Cette dernière journée est particulière puisqu'elle marque la réussite de notre expédition tout en saluant l'esprit d'équipe que chacun a su entretenir, sans oublier que notre  physique et notre mental ont été sollicités quotidiennement durant quasiment trois semaines d'expédition pour relier Cambridge Bay à Gjoa Haven.

Mais cela signifie aussi que cette belle aventure se termine, car, bien vite, nous apercevons les toits multicolores des maisons et l'antenne qui domine Gjoa Haven. Notre rythme s'est forcément accéléré, nous observons les premiers signes de vie humaine, les odeurs, ce qui nous redonne de l’énergie pour les derniers kilomètres. Nos émotions sont perceptibles lorsque les spatules de nos skis pénètrent dans le village, coupant notre lignée d'arrivée virtuelle.

Nous rejoignons ensemble notre hôtel pour y retrouver le confort d'une vraie chambre. Il n’y a pas meilleure sensation que l’eau chaude sur la peau. Un véritable dîner réparateur nous permet de célébrer le terme de cette aventure, avant de s'endormir dans un vrai lit douillet !!

Après une confortable nuit d’hôtel et un copieux petit-déjeuner, la journée est essentiellement consacrée au rangement du matériel et son conditionnement en vue du transport pour le retour en Europe. Quelques formalités administratives à régler sur place.

C'est aussi l'occasion d'en profiter pour découvrir le village de Gjoa Haven et retrouver le confort d'un dîner et d'une nouvelle nuit à l'hôtel.

Nous gardons ces 2 jours au cas où la météo nous aurait empêchés de voler la veille ou si nous avons accumulé un peu de retard pendant l'expédition en raison notamment de mauvaises conditions météorologiques.

Après une dernière nuit à Gjoa Haven, nous sommes transférés en taxi vers l'aéroport pour prendre notre premier avion pour notre vol de retour en direction de l'Europe.